Ils étaient plusieurs centaines venus honorer la mémoire d’un membre de la communauté tué par balle la semaine dernière à Rennes.
« On tire sur nous deux fois: la première fois pour nous tuer, la deuxième fois pour nous salir », a dénoncé Magomed, 30 ans, voisin d’Hamzat Labazanov, 23 ans, tué d’une balle dans la tête, le 17 mars en pleine journée, dans le quartier Cleunay à Rennes.
Deux hommes d’une vingtaine d’années, connus de la justice, ont été mis en examen pour meurtre en bande organisée et complicité et incarcérés. Le jour des faits, le procureur de Rennes Philippe Astruc a évoqué un « possible règlement de comptes sur fond de trafic de stupéfiants ».
« Dès qu’il se passe quelque chose avec un Tchétchène, on nous colle cette étiquette », a regretté Magomed.
« Les membres de notre communauté meurent et c’est nous qui sommes accusés. »
Près de 400 Tchétchènes, venus de toute la Bretagne, du Mans ou de Rouen, se sont rassemblés à Rennes près de l’immeuble de la victime. Ils ont observé un temps de prière puis ont marché jusqu’au Carrefour City devant lequel Hamzat a été tué.
« C’était quelqu’un de bien, tout le monde l’aimait, avait confiance en lui », a décrit un jeune Tchétchène de 23 ans à la fine barbe.
« Un petit gars en or, qui n’a jamais été mêlé à quoi que ce soit d’illégal », a approuvé Magomed, 31 ans, ingénieur logisticien, qui habite le même immeuble.
Selon ses proches, Hamzat a été tué parce qu’il a voulu chasser des dealeurs du hall de son immeuble. Lue pendant le rassemblement, une résolution de l’association Paix et droits de l’homme a dénoncé les « informations erronées » et « accusations tendancieuses à l’encontre des réfugiés tchétchènes ».
Appel au calme
Le père de la victime a appelé au calme et demandé aux plus jeunes de se tenir à distance des points de deal.
A Strasbourg, environ 150 Tchétchènes se sont également rassemblés place de la République, dont certains venus de Paris, Nice ou Reims. « Nous sommes des réfugiés politiques qui avons laissé notre patrie pour vivre EN PAIX », proclamait une pancarte.
« Nous sommes nous-mêmes assimilés à des trafiquants. C’est quelque chose que nous ne comprenons pas », a dénoncé Chamil Albakov, porte-parole de l’Assemblée des Tchétchènes d’Europe. « Ce n’est pas parce que nous vivons dans des quartiers populaires que nous pouvons être dénigrés, ou que des jeunes peuvent être tués ».
« Nous demandons que l’origine tchétchène ne soit pas associée systématiquement à la criminalité. Dans les médias, le mot « Tchétchène » est systématiquement associé à la violence ou à la criminalité », a abondé l’avocat Zelimkhan Chavkhalov.
Pour Ousman Artchakov, porte-parole de l’association Daymohk, « notre seule faute, c’est que nous ne cédons pas devant ces dealers ».
Plusieurs associations ont adressé samedi une lettre ouverte au ministre de l’Intérieur. « Notre origine ne cesse d’être trainée dans la boue (…) Nous n’aurons de cesse de nous battre pour nos droits pour réfuter ces préjugés », écrivent-elles notamment.